La plupart du temps, lorsque l’on investit dans l’immobilier, on souhaite se créer un patrimoine pour en profiter plus tard. L’objectif premier est souvent la retraite. La peur d’avoir à subir une perte de revenus contraint de nombreux Français à investir dans la pierre.

Sauf que l’on oublie parfois que, qui dit revenus fonciers dit fiscalité qui s’alourdit. Et c’est ici que les choses se corsent.

Car tout investissement locatif reste lourdement taxé : les revenus fonciers viennent s’ajouter aux autres revenus (salariés dans la plupart des cas) et sont taxés à hauteur de la tranche marginale d’imposition du contribuable. Mais, ce n’est pas tout : les revenus tirés de la pierre font également l’objet de prélèvements sociaux au taux unique de 15, 5 %.

Ce système de double imposition doit être anticipé par l’investisseur. Parmi les parades légales pour réduire ces impôts, on trouve le dispositif Louer Abordable.

Le constat

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Depuis des décennies, les gouvernements successifs essaient de résoudre la quadrature du cercle.

D’un côté, l’accès au logement pour une part non négligeable de la population française reste chose compliquée : près de 15 % des Français sont touchées par la tristement célèbre « crise du logement ». Qu’elles soient sans domicile fixe, contraintes de se loger chez des proches ou hébergées dans des taudis, ces personnes vivent au quotidien des situations pénibles.

Parallèlement, le niveau des loyers a globalement augmenté, connaissant même une hausse brutale durant les années 2000. A Paris, ils ont littéralement explosé puisqu’ils ont été multiplié par deux en 10 ans.

Voilà pour ce qui concerne les locataires. Qu’en est-il pour les propriétaires bailleurs ?

Ces derniers ont également « subi » la grande hausse des prix de l’immobilier des années 2000. Cette situation a dégradé le niveau moyen de rentabilité de leur investissement locatif. Conséquence naturelle : ils ont cherché à augmenter les loyers qu’ils perçoivent et à réduire leurs charges.

Or, une des charges les plus lourdes pour tout investisseur immobilier est constitué par les impôts sur le revenu.

C’est ici que le dispositif Louer Abordable prend tout son sens.

Louer Abordable : la philosophie

Le dispositif Louer Abordable permet à des ménages aux revenus modestes d’accéder à des logements dont les loyers sont plafonnés en échange d’une déduction fiscale pour les propriétaires bailleurs.

Mis en place à travers la Loi Cosse depuis février 2017, ce mécanisme succède au régime dit « Borloo ancien » dont l’efficacité était éprouvée mais qui n’était pas très connu des investisseurs.

Que se passe-t-il si vous avez signé une convention relevant du « Borloo ancien » ?

Dans ce cas, pas de panique ! Les conventions restent valables pendant la durée pour laquelle vous aviez signé (6 ou 9 ans).

Louer Abordable reprend par conséquent les grandes lignes du Borloo ancien. Notez que ce nouveau mécanisme est également dénommé « Cosse ancien » alors qu’il concerne autant les logements neufs qu’anciens.

L’idée est finalement assez simple : plus le propriétaire bailleur accepte de baisser son loyer, plus la déduction fiscale est importante. Jusqu’à 85 % !

Conditions pour bénéficier du régime

Première condition : il doit s’agir d’un logement neuf ou ancien affecté à la résidence principale du locataire.

Deuxième condition : le logement doit être loué nu. Les meublés sont exclus de facto de ce dispositif pusique la location meublée fait l’objet d’un traitement spécifique au niveau fiscal.

Troisième condition : le logement ne peut pas être loué à un membre du foyer fiscal du bailleur, à un de ses ascendants ou descendants. De même, il n’est pas possible de conventionner avec une personne occupant déjà le bien (sauf à l’occasion du renouvellement du bail).

Le zonage

Mais ce n’est pas tout. Le bien doit également être situé dans une zone visée par le dispositif. Logiquement, les zones tendues sont favorisées : plus le déséquilibre est important entre l’offre et la demande de logements, plus la déduction fiscale sera élevée.

Dans les zones A, Abis et B1 (déséquilibre important, grandes agglomérations), la déduction s’élève à :

30 % des revenus locatifs bruts pour les conventions à loyer intermédiaire.

70 % des revenus locatifs bruts pour les conventions à loyer social ou très social.

Dans les zones B2 (déséquilibre, agglomérations moyennes), la déduction est de :

15 % des revenus locatifs bruts pour les conventions à loyer intermédiaire.

50 % des revenus locatifs bruts pour les conventions à loyer social ou très social.

Pour savoir dans quel type de zone est situé votre bien, prenez attache avec l’Agence Nationale de l’Habitat (ANAH) locale. Il y en a une par département en principe. Ou utilisez ce simulateur mis à disposition par le Ministère d la cohésion des territoires :

http://www.cohesion-territoires.gouv.fr/spip.php?page=article-sous-site&id_article=3454&sommaire=708

Mais, la déduction fiscale peut être encore plus importante. Elle s’élèvera à 85 % quelle que soit la zone, si le bailleur choisit l’intermédiation locative. Dans ce cas, il confie la gestion locative du bien à un organisme à vocation sociale. C’est cet organisme qui s’occupe de tout : recherche du locataire, versement des loyers et des charges et entretien du bien.

Niveau de la déduction fiscale

Zones A, Abis et B1

Zone B2

Zone C

Loyer intermédiaire

30 %

15 %

Seule intermédiation locative = 85 %

Loyer social

70 %

50 %

Seule intermédiation locative = 85 %

Loyer très social

70 %

50 %

Seule intermédiation locative = 85 %

Intermédiation locative

85 %

85 %

85 %

La convention avec l’ANAH

Il faut ensuite se rapprocher de l’ANAH locale et signer une convention avec cet organisme.

Ici encore, le propriétaire doit s’engager.

Tout d’abord, son bien doit être loué en dessous d’un certain niveau de loyer (calculé au mètre carré). Voici les plafonds à respecter :

Plafonds de loyer 2017 au m²

Zone Abis

Zone A

Zone B1

Zone B2

Zone C

Intermédiaire

16,83

12,5

10,07

8,75

8,75

Social

11,77

9,06

7,80

7,49

6,95

Très social

9,16

7,05

6,07

5,82

5,40

On en conclue logiquement que plus le bien loué dispose d’une grande surface, plus le loyer peut être élevé. Faire jouer le mécanisme « Cosse ancien » peut alors se révéler intéressant puisque le loyer ne sera pas trop « rogné » par rapport aux loyers moyens de l’agglomération concernée. A contrario, conventionner un studio avec Louer Abordbale ne sera pas forcément pertinent.

Ensuite, le propriétaire bailleur doit louer à des personnes dont les revenus ne dépassent pas un certain seuil. Ces plafonds sont déterminés en fonction des zones. Vous pouvez en prendre connaissance ici :

http://www.anah.fr/proprietaires/proprietaires-bailleurs/le-niveau-de-ressources-des-locataires/

Par exemple, une personne seule en zone A ne devra pas déclarer plus de 37 126 € de ressources pour pouvoir louer un bien dont le loyer ne pourra excéder 12,50 € au mètre carré dans le cadre d’une convention à loyer intermédiaire. La déduction fiscale sera ici de 30 %.

La convention est signée pour 6 ans sans travaux et pour 9 ans lorsque le propriétaire bailleur bénéficie d’aides pour réaliser des travaux dans le logement.

Est-il intéressant de bénéficier de ses aides ?

Ces subventions sont « fléchées » et doivent concerner une liste limitative de travaux : installation / rénovation de réseaux d’eau, d’électricité ou de gaz, installation d’une salle de bain ou de toilettes, confortement de fondations, remplacement d’une toiture, travaux permettant d’améliorer la performance énergétique du logement …

Les aides peuvent représenter jusqu’à 35 % du montant total des travaux hors taxes dans la limite de 28 000 € par logement.

Attention, ces aides doivent être déclarées comme des revenus locatifs auprès de l’administration fiscale ! Il faut donc bien faire ses comptes.

En cas de départ du locataire durant la convention, le propriétaire s’engage à remettre son bien en location en respectant les mêmes conditions.

Un dispositif cumulable avec la déclaration fiscale au réel

Le propriétaire bailleur qui dispose de revenus fonciers peut déclarer ces revenus soit en micro foncier, soit au réel.

Le microfoncier lui permet de bénéficier d’un abattement de 30 % sur ses revenus fonciers si ces revenus bruts annuels ne dépassent pas 15 000 €.

Mais, il peut également opter pour le régime réel. Dans ce cas, le bailleur peut déduire toutes les charges qu’il a effectivement supportées.

Et, si le cumul du « Cosse ancien » avec le microfoncier n’est pas possible, il est en revanche admis de le cumuler avec le régime réel.

Dans ce cas, ce cumul devient particulièrement intéressant puisque le bailleur peut déduire au moins 15 % de ses revenus locatifs puis un ensemble de charges. Parmi celles-ci les intérêts d’emprunts, les charges de copropriété (à l’exception de celles supportées par le locataire), la taxe foncière (moins la taxe d’enlèvement des ordures ménagères prise en charge par le locataire), les travaux, l’assurance propriétaire non occupant… Et la liste n’est pas exhaustive !

Pour conclure

Pour résumer, on peut dire que le dispositif Louer abordable est fondé sur le principe du donnant / donnant ou gagnant / gagnant.

Le propriétaire accepte un niveau de loyer plafonné pour permettre l’accès au logement à des personnes aux revenus limités. En retour, il bénéficie d’une déduction fiscale.

Il s’agit un peu du même esprit que celui présidant aux dons aux organismes d’intérêt général qui font l’objet d’une réduction d’impôt égale à 66 % des versements.

Enfin, il est intéressant de relever que ce mécanisme a une « durée de vie » limitée puisqu’il est prévu jusqu’au 31 décembre 2019. Qu’en sera-t-il après ? Nul ne le sait.

N’hésitez-pas à consulter nos articles sur l’amendement Bouquin et le premier investissement immobilier pour un jeune couple !